Le 3 novembre 2022, le Réseau Avenir égalitaire, en partenariat avec la Canadian Women’s Chamber of Commerce (CanWCC), a organisé une séance de réflexion virtuelle et interactive sur les principaux obstacles auxquels font face les femmes, les personnes de la diversité de genre et les communautés autochtones et racisées dans leur quête de justice économique. Il s’agissait de la première séance de réflexion du Réseau Avenir égalitaire consacrée à l’intersectionnalité entre l’équité économique et l’égalité des genres au Canada. Un total de 35 personnes ont participé à la séance et à la période de questions. Des représentant·e·s d’organisations telles que la CanWCC, Moms at Work, le Canadian Women of Colour Leadership Network, la National Aboriginal Capital Corporations Association (NACCA) et le National Collective of Women in Business (NCWIB) ont fait part de leurs perspectives et de leurs réflexions sur les enjeux, les difficultés et les obstacles qui nuisent à l’atteinte de la justice économique, en se basant sur leurs expériences personnelles et professionnelles.

Après cette discussion de fond, l’ensemble des participant·e·s ont été invité·e·s à partager leurs propres réflexions et expériences. Cette conversation ouverte était également une occasion pour les participant·e·s de transformer des idées en partenariats. Pour progresser vers l’équité économique, il faudra s’éloigner du statu quo et s’attaquer aux défis structurels et systémiques en suivant la voie tracée par les femmes, les personnes bispirituelles et de la diversité de genre et les communautés LGBTQ+ et PANDC, et ce, dans un esprit de solidarité mutuelle.

Ce que nous avons entendu :

  1. Pourquoi l’équité économique est-elle importante?

Tout autour du monde, les femmes dans toute leur diversité accomplissent les tâches les moins valorisées, gagnent moins que les hommes cisgenres et assument une plus grande part de travail de soins et de travail non rémunéré; elles se retrouvent par conséquent à essuyer le plus fort de la fracture économique grandissante. La pandémie de COVID-19 a créé une crise économique sans précédent qui a frappé le plus durement les communautés les plus pauvres, vulnérables et marginalisées. L’équité économique importe parce que les femmes, les personnes racisées (autochtones, noires et de couleur [PANDC]) et les communautés 2SLGBTQ+ sont tout particulièrement à risque de subir les effets d’une récession mondiale et sont déjà désavantagées par les barrières systémiques actuelles qui les empêchent de participer de manière équitable à l’économie mondiale.

Au niveau systémique, les normes sociales, politiques et institutionnelles ont créé des structures en appui à des politiques, des lois et des tactiques économiques inéquitables qui, dans les meilleurs des cas, excluent certains groupes et, dans les pires des cas, perpétuent délibérément des préjudices et créent des obstacles pour les groupes marginalisés et en quête d’équité.

  1. Les obstacles à l’atteinte de l’équité économique

  • Les perspectives des jeunes sont absentes des espaces de prise de décisions économiques

La jeunesse est presque entièrement exclue des discussions sur l’équité économique. Par conséquent, elle ne se reconnaît pas dans les efforts déployés en la matière. Ce travail peut être inaccessible pour les jeunes, car il est abordé dans un langage technique qui ne correspond pas aux expériences individuelles, ce qui les isole et les désintéresse encore davantage du processus. Afin de les impliquer, il faut utiliser un langage accessible, qui leur parle et qui s’appuie sur leurs expériences communes. Cela renforcera leur capacité à exprimer leurs besoins et à changer les dynamiques de pouvoir afin que leurs voix soient entendues et prises en compte dans les décisions. Pour qu’il y ait un changement de fond, nous avons besoin d’une génération de jeunes conscient·e·s de leur pouvoir d’agir et de la façon dont les iniquités économiques affectent les individus et leurs communautés. 

  • Renforcement des pouvoirs économiques individuels

Lorsqu’il s’agit de faire progresser l’équité économique, le rôle de l’individu est trop peu souvent pris en compte, l’accent étant plutôt mis sur le niveau systémique. Nous devons changer d’orientation et mettre l’accent sur l’éducation économique et le renforcement du pouvoir des individus. Les systèmes actuels sous-estiment le pouvoir de décision que détient l’individu moyen. À titre de référence, en 2021, les petites entreprises représentaient 98,1 % des employeurs au Canada, et c’est de là que viendra le changement. La démocratisation de l’éducation économique et le travail de sensibilisation sont des moyens de parvenir à des solutions équitables qui changeront le discours, les mentalités et l’équilibre des pouvoirs.

Le contrôle de l’accès et le cloisonnement entre les secteurs qui caractérisent l’écosystème économique continuent de nuire non seulement aux individus, mais aussi à nos avancées collectives en matière d’équité économique. Par exemple, dans les espaces dédiés à la défense des intérêts, les discussions économiques sont inaccessibles. On y parle d’équité économique en termes trop techniques, ce qui crée un environnement non inclusif qui empêche les personnes ayant des expériences et des parcours différents d’accéder à ces espaces.   

  • Effacement de la réalité des communautés autochtones, noires et racisées

Les communautés autochtones, noires et marginalisées font face à un effacement, un musellement et des obstacles importants au sein de l’écosystème économique. Par exemple, il y a une économie autochtone de cent milliards de dollars actuellement mal desservie par les institutions financières traditionnelles parce qu’elles la considèrent comme étant trop risquée pour y investir. Ces politiques économiques sont le reflet du legs colonial qui perdure au Canada et illustrent la multitude d’obstacles systémiques auxquels sont confrontées les communautés PANDC qui veulent accroître leurs propres capacités économiques.

Le soutien au développement économique des communautés autochtones du Canada fait partie intégrante du mandat de la NACCA. Au cours de la pandémie, la NACCA a été en mesure d’accorder plus de 1000 prêts à des entreprises, d’une valeur totale de plus de 100 millions de dollars, et de créer 3800 emplois à temps plein. Non seulement cet investissement dans les communautés autochtones contribue au PIB global du Canada, mais il entraîne également des retombées sociales majeures et significatives qui favorisent le bien-être des communautés et restituent le droit à la dignité brimé de nombreuses communautés autochtones et mal desservies au Canada.

  1. Des mesures pour faire progresser l’équité économique au Canada (et partout dans le monde)
  • Collaboration et partenariats

Le travail sur l’équité doit s’effectuer à tous les niveaux et dans une optique intersectionnelle en se concentrant sur le renforcement du pouvoir des individus et la création de partenariats et d’espaces inclusifs. En adoptant cette optique intersectionnelle, nous devons examiner comment intégrer la réconciliation et la décolonisation dans notre travail. La division empêche le progrès, une situation très répandue dans le secteur à but non lucratif, car le système est conçu pour être intrinsèquement conflictuel, surtout lorsqu’il s’agit d’obtenir des fonds et des ressources qui sont limités. Par exemple, le manque de financement durable et à long terme, les critères d’admissibilité stricts des modèles de subvention (c’est-à-dire la nécessité d’avoir le statut d’organisme de bienfaisance pour avoir accès à certaines subventions) et la concurrence pour l’obtention d’un minimum de financement montent les organisations les unes contre les autres et alimentent un système de précarité.

De plus, les contraintes associées aux subventions par rapport à certaines revendications peuvent empêcher la prise de parole ou la mobilisation en faveur d’un changement, car la sécurité financière des organisations est liée à ces contraintes énoncées dans les ententes de financement. Tout cela entrave le progrès et crée un système compétitif qui, au bout du compte, nuit au travail du mouvement. Nous devons travailler collectivement pour trouver des moyens d’opérer en dehors de ces systèmes, de décoloniser les espaces où nous intervenons et de créer des partenariats qui nous soutiennent et permettent la collaboration, car ce n’est qu’à travers la collaboration et la concertation que nous pourrons faire des progrès. En nous rassemblant dans un mouvement pour l’équité économique dans le but d’établir une compréhension et un consensus sur les enjeux qui touchent nos communautés, nous faciliterons le changement aux niveaux individuel, organisationnel et systémique et renforcerons le pouvoir des groupes et mouvements populaires.

  • Équité salariale

L’équité salariale est un symbole puissant d’équité économique et une avancée concrète autour de laquelle se rallier. Malheureusement, il y a encore beaucoup de travail à faire pour combler l’écart salarial. Le travail des femmes continue d’être sous-évalué. De plus, à l’échelle mondiale, on continue de créer des lois et des politiques qui favorisent directement les hommes et créent des conditions dans lesquelles les femmes, en moyenne, seront toujours plus pauvres que les hommes. L’écart salarial est encore plus grand lorsque l’on tient compte des identités croisées comme la race, les capacités et l’orientation sexuelle, qui accroissent le risque de subir les effets négatifs d’une récession mondiale. La réalisation de l’équité salariale serait un grand pas vers l’équité économique en général.

  • Reprise et progrès post-pandémie

La COVID-19 a exacerbé encore davantage les obstacles économiques auxquels sont confrontées les femmes, les personnes racisées et les personnes de la diversité des genres au Canada. Au cours des deux dernières années, on a beaucoup parlé de ce dont on a besoin pour que le Canada se relève de la pandémie. Ces discussions ont fait ressortir les iniquités et tout le travail qu’il reste à faire pour atteindre l’égalité des genres au Canada et dans le monde.

Le moment est venu de sortir des sentiers battus et de trouver des solutions novatrices tout en amplifiant la voix des groupes en quête d’équité. Il y a une volonté de la part des décideurs et des décideuses de se tourner vers l’engagement communautaire et les solutions portées par la communauté pour lutter contre les iniquités économiques. Grâce aux partenariats et à la collaboration, nous pourrons rassembler des personnes ayant des perspectives et des expériences de vie différentes afin d’aborder les enjeux importants et de les faire progresser à tous les niveaux, et ainsi arriver à un consensus et une compréhension commune.

Visionnez l’enregistrement :

Previous
Les mères qui travaillent trouvent un soutien et une voix grâce à Moms at Work
Next
Get Caught Up on the Latest Gender Equality Stories You May Have Missed During the 2022 Holidays

Le Réseau Avenir égalitaire reconnaît que les peuples autochtones sont les gardiens traditionnels de l’Île de la Tortue, qu’on appelle également le Canada.

Veuillez consulter notre reconnaissance du territoire ici