Saviez-vous qu’à l’échelle mondiale, environ quatre membres du personnel de la santé sur cinq sont des femmes? Le Réseau Avenir égalitaire souligne le travail de travailleuses de la santé au Canada.

Afomia Gebre a obtenu son diplôme en pharmacologie de l’Université Dalhousie en 2020. Elle termine actuellement sa résidence auprès de l’Autorité sanitaire de la Nouvelle-Écosse (NSHA). En plus de sa passion pour la pharmacologie, Afomia travaille auprès de groupes défenseurs de l’égalité. Elle a notamment contribué à la création du premier comité de diversité et d’équité du collège de pharmacologie et a voyagé au Ghana comme déléguée de la Convergence de la jeunesse africaine et de la gouvernance (CJAG), où elle a été présidente du comité de la santé. Elle travaille également comme mentore et tutrice pour diverses organisations jeunesse. 

Ayant immigré au Canada à 5 ans et aidé ses parents à s’y retrouver dans le système de la santé, Afomia s’est vite rendu compte des lacunes en matière de prestation de soins de santé et de l’importance de l’humilité culturelle dans la pratique. Son principal objectif de carrière est de faire partie de la solution pour résoudre l’iniquité dans notre système de santé.

Comment la pandémie a-t-elle affecté votre travail? Si les Canadiennes et les Canadiens pouvaient comprendre une chose à propos de votre travail, de quoi s’agirait-il?

La pandémie a ajouté une couche d’anxiété et de stress que je n’avais jamais ressentie. Je suis présentement résidente auprès de l’Autorité sanitaire de la Nouvelle-Écosse. Ce programme de pharmacologie est exigeant en soi, et cette pandémie l’a complexifié davantage. L’environnement de travail a changé. Nous devons constamment avoir conscience de nos interactions avec la patientèle et nos collègues. Toutefois, la pandémie a également créé un environnement dans lequel nous nous sentons plus déterminés, où nous avons l’occasion d’intensifier nos efforts et de faire partie d’équipes multidisciplinaires appliquées qui prodiguent des soins aux patients en période difficile. La COVID-19 a également créé un environnement dans lequel nous comprenons nos patientes et patients de façon plus personnelle, car même si la pandémie se manifeste différemment d’une personne à l’autre, nous avons tous, d’une certaine manière, été touchés négativement par ce virus. Il est donc plus facile d’éprouver de l’empathie pour autrui et d’être en relation les uns avec les autres. 

S’il y a une chose que j’aimerais que le peuple canadien comprenne à propos de mon travail à titre de résidente en pharmacie autant qu’à titre de pharmacienne est le fait que les pharmaciennes et pharmaciens sont des piliers de la prestation des soins de santé et non des gardes de médicaments. J’aimerais que plus de personnes comprennent à quel point nous sommes polyvalents, accessibles et vaillants, particulièrement à quel point nous avons été accessibles tout au long de cette pandémie pour combler les lacunes créées par la COVID-19. 

Comment la pandémie a-t-elle affecté votre vie personnelle?

Depuis le début de cette pandémie, ma vie me semble plus structurée, mais pas de façon positive. Je n’ai pas la liberté de faire des choses à la dernière minute et je ne peux pas passer mes journées en étant aussi spontanée qu’avant. Tout a besoin d’être planifié et prévu. Ça me fait vivre une certaine anxiété, car chaque semaine, j’ai l’impression de devoir planifier la semaine à venir. La pandémie a également eu des impacts économiques, particulièrement en tant que nouvelle diplômée en résidence, auxquels je ne pensais pas faire face un jour. Avec tout cela, la pandémie a changé ma façon de voir les choses et j’éprouve plus de gratitude envers ma situation. La pandémie m’a également permis de passer plus de temps avec ma famille, parce qu’on est tous plus souvent à la maison qu’avant. Plus que tout, la pandémie m’a rappelé de ralentir et d’apprécier où je suis dans la vie et les personnes qui m’entourent, parce qu’elle nous a montré à toutes et à tous à quelle vitesse notre situation peut changer. 

Vous êtes-vous fait vacciner? Si oui, qu’avez-vous ressenti lorsque vous avez appris que vous alliez recevoir le vaccin? Sinon, comment l’attente affecte-t-elle votre santé mentale?

Je me suis fait vacciner. Quand j’ai su que j’allais recevoir le vaccin, je me suis sentie soulagée. Pas seulement parce que je suis maintenant mieux protégée contre le virus, mais parce que pour moi, c’était une lumière au bout d’un tunnel. J’avais l’impression de participer à une course qui semblait ne jamais vouloir s’arrêter, mais à l’horizon, nous pouvons maintenant voir la ligne d’arrivée. 

Avez-vous un conseil à donner aux étudiantes et étudiants pendant cette période?

Quand j’étais étudiante, je devais jongler avec les études, le travail et les activités parascolaires. Souvent, toutes ces choses passaient avant moi et je me rendais compte que je n’allais pas bien seulement lorsque j’étais complètement épuisée. Je ne prenais pas soin de ma santé mentale, parce qu’exceller dans tout ce que je faisais était plus important pour moi, mais ç’a fini par me rattraper. Maintenant, les étudiantes et étudiants font toutes ces choses-là, mais en temps de pandémie, ce qui ajoute un stress supplémentaire. Mon conseil serait de prendre soin de votre santé mentale. Soyez avare de votre temps, n’en faites pas trop et surtout, faites ce que vous aimez. Prenez soin de vous pour pouvoir être totalement présente ou présent pour récolter les fruits de votre travail. 

La dernière année a été longue et difficile. Qu’est-ce qui vous motive? Avez-vous des histoires d’espoir à partager?

Ce qui me motive est mon objectif et la raison pour laquelle je suis devenue pharmacienne. J’ai été dans ce système de santé en tant que patiente noire et en tant que pharmacienne noire. Dans ces deux expériences, j’ai été exposée au racisme et à la discrimination. Nous existons dans un système de santé où nous ne voyons pas la personne derrière le patient. Même si l’importance des déterminants sociaux de la santé est reconnue, je pense qu’il reste du travail à faire pour promouvoir l’inclusion dans la pratique de pharmacologie et dans les soins de santé au sens large. Ce qui me motive est de savoir que j’ai un rôle à jouer pour faire avancer la pharmacologie vers une pratique qui prodigue des soins complets. Une pratique dans laquelle l’humilité culturelle est obligatoire et non recommandée. Une pratique dans laquelle la couleur de votre peau, vos croyances religieuses, votre identité de genre, votre statut économique ou vos capacités physiques ne dictent pas la qualité des soins que vous recevez. Voilà ce qui me motive – me souvenir de la raison pour laquelle j’ai choisi le domaine de la santé et savoir qu’il y a beaucoup de travail à faire pour que notre système de santé favorise l’équité en santé.

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